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L'expertise juridique dans les différentes variantes du droit

27 septembre 2017

La prescription triennale pour l’action en responsabilité contre les dirigeants d’une SAS

 

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Par un arrêt du 26 avril 2017, la Cour de Cassation a affirmé la nécessité de rapporter la preuve de la dissimulation des actes fautifs pour pouvoir reporter le point de départ de la prescription triennale applicable aux sociétés par actions et la responsabilité limité. 

 

Cass. com., 26 avr. 2017, n° 15-14.627, Sté GL Investissements c/ M.  Y et M. X

 

Le principe est que le délai de prescription court à compter de la date du fait dommageable, mais ce point de départ peut être reporté si il y a dissimulation, cependant la simple absence de connaissance des faits fautifs ne prouve pas la volonté de dissimulation. 

 

Ainsi en l’espèce, un ancien dirigeant de SAS voit sa responsabilité engagé par la société a cause de la vente de bien immobilier sous-évalué créant un manque a gagner. La faute de gestion a certes était relevé ,cependant la Cour de Cassation casse l’arrêt concernant la prescription des faits fautifs. 

 

« Attendu que pour condamner…l’arrêt retient qu’il y a lieu d’écarter l’exception de prescription invoquée dès lors que l’assignation a été délivrée dans les trois ans de la révélation aux associés des mandats de gestion immobilière consentis à la société Gesim sur des ensembles immobiliers et qu’aucun élément du dossier ne permet de considérer que les dits associés avaient eu connaissance de ces actes de ces actes de gestion antérieurement ».

 

La Cour de Cassation casse donc l’arrêt de Cour d’appel au double visa des articles L.225-254 et L.227-8 du code de commerce, respectivement applicable aux SA et l’autre disposant que « les règles fixant la responsabilité des membres du conseil d’administration et du directoire des sociétés anonymes sont applicables au président et aux dirigeants de la société par actions simplifiée ». 

Cet arrêt revêt en fait un seul et unique principe qui est que la dissimulation est le seul moyen de reporter le point de départ de la prescription, mais se subdivisant en réalité en deux idées directrice: 

 

D’abord que la preuve de la dissimulation incombe non au dirigeant mais bien au demandeur qui souhaite voir le dirigeant condamné (I), et ensuite que la dissimulation suppose une volonté, une intention d’occulter l’acte litigieux (II). 

 

    I/ La charge de la preuve de la dissimulation des faits fautifs 

L’interprétation que font les juges du fonds de la dissimulation porte a conséquence. 

En effet l’arrêt suggère « qu’aucun élément du dossier ne permet de considérer que les dits associés avaient eu connaissance de ces actes de gestion antérieurement ».

 

Or cette interprétation que font les juges du fond montre que la charge de la preuve incomberait au défendeur donc à celui a qui on reproche d’avoir dissimulé. 

Or la Cour de Cassation casse l’arrêt dans les termes suivant: « sans constater que l’existence de ces mandats avait été dissimulée, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale ». 

 

Ici la Cour de cassation souhaite remettre les choses a leurs place en montrant que la charge de la preuve ne doit pas être renversé et qu’il est nécessaire d’apporter une preuve de la dissimulation et que de ce fait la simple absence de connaissance des faits fautifs ne prouve pas la dissimulation. 

 

Cette question de dissimulation ne vient en réalité pas seule puisqu’elle va de pair avec la notion même de dissimulation. 

 

    II/ La notion de dissimulation subordonné à son caractère intentionnel

 

Certains arrêts antérieurs montraient beaucoup plus que celui-ci la nécessité de prouver la « volonté de dissimulation », notamment dans l’arrêt du 30 mars 2010 rendu par la chambre commerciale.

 

 Mais en l’espèce la formule utilisé est différente, ce qui a pu laisser penser à une forme de reconnaissance plus objective de la dissimulation mais qui n’a pas pu par la suite être reconnu ou confirmé. 

 

Ainsi la cour de cassation rappelle d’une manière ou d’une autre que les juges du fond ne peuvent renverser la charge de la preuve, en disant qu’aucun élément ne prouvaient la connaissance des demandeurs des faits litigieux, et par corrélation la cour de cassation rappelle la nécessité que cette charge de la preuve s’appui sur la volonté de dissimulé du dirigeant. 

 

La Cour recherche une forme de juste milieu. 

 

 

Joan DRAY

Avocat à la Cour

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27 septembre 2017

4 modifications d'application immédiate : Le décret macron du 23/09/2017

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Les ordonnances sur le droit du travail ont été publiées au Journal Officiel le 23 septembre 2017. Certaines mesures entrent en vigueur dès le lundi 25 septembre 2017.

Sur le plan du contentieux, quatre grands changements sont d’application immédiate : 

  • Le salarié a désormais un délai d’un an suite à son licenciement pour saisir le Conseil des prud’hommes.

  • Les indemnités mises à la charge de l’employeur pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sont déterminées par un barème comportant un minimum et un maximum en fonction de l’ancienneté du salarié au sein de l’entreprise.

Un minimum moins élevé s’applique aux entreprises ayant moins de 11 salariés.

Un aperçu : 

Ancienneté du salarié en année complète

Minimal  en mois de salaire brut

Maximale en mois de salaire brut 

Minimale pour les entreprises de moins de 11 salariés

0

Sans objet

1

Sans objet

1

3

2

0.5

2

3

3.5

0.5

3

3

4

1

4

3

5

1

5

3

6

1.5

6

3

7

1.5

7

3

8

2

8

3

8

2

9

3

9

2.5

10

3

10

2.5

11

3

10.50

-


En outre, pour déterminer le montant de ces dommages et intérêts, le juge  pourra tenir compte des indemnités légales et conventionnelles de licenciement obtenues par le salarié et donc minorer les indemnités. 

Ces indemnités légales de licenciement ont été augmentées. Elles sont désormais de 1/4 de mois de salaires par année d’ancienneté du salarié au lieu de 1/5. 

Ce barème ne s’applique pas en cas de licenciement nul : Ayant permis la violation d’une liberté fondamentale, des faits de harcèlement moral ou sexuel, une discrimination.

  • La lettre de licenciement, dont la qualité pouvait faire basculer une affairejusqu’ici enfermait le litige, c'est-à-dire que rien ne pouvait y être ajoutée en cas de contentieux. Désormais, l’employeur pourra licencier en utilisant un formulaire type, dont on attend la publication par décret. Et, il pourra apporter des précisions sur la motivation du licenciement dans un courrier complémentaire. Il pourra donc compléter voir régulariser sa motivation à posteriori.

  • Les difficultés économiques de l’entreprise seront désormais évaluées au niveau national et non plus internationale pour les multinationales. Dès lors que l’entreprise a des difficultés en France même si elle fait des bénéfices dans d’autres contrées, elle peut lancer un plan social en France.

 

 

Jenny LAMY

Avocat

 

26 septembre 2017

Désignation d’un mandataire ad hoc et fixation de l’ordre du jour par les juges du fond

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Par un arrêt du 26 avril 2017, la Cour de Cassation a affirmé que les juges du fond étaient en droit d’une part d’ordonner la désignation d’un mandataire ad hoc avec pour mission de convoquer et de présider l’assemblée générale des associés et d’autre part de fixer à l’ordre du jour la constatation de la révocation et la nomination d’un gérant spécialement désigné. 

 

Le principe est qu’en cas de vacance de la gérance de la SARL, le juge peut se fonder sur son pouvoir d’ordonner des « mesures urgentes » donné par l’article 812 al.2 du Code de procédure civil dans le cas de où l’article L223-27 du code de commerce est inapplicable. 

Ces mesures urgentes sont données par ordonnance et peuvent si l’ordonnance est motivée, comprendre, outre la désignation d’un mandataire ad hoc et la fixation de l’étendue de sa mission, la détermination de l’ordre du jour de l’assemblée. 

 

En l’espèce une SARL voit son dirigeant (associé minoritaire) révoqué pour une cause légitime, en vertu de l’article L.223-25 al.2 du code de commerce. 

 

A la suite à cette révocation judiciaire, les juges du fond ont ordonné la désignation d’un mandataire ad hoc pour réunir une assemblée générale ayant pour objet de désigner un nouveau gérant, mais pas uniquement puisque les juges du fond ont eux même fixé l’ordre du jour ainsi que le nom de l’associé majoritaire en remplacement de la gérance resté vacante. 

 

« Mais attendu que l'arrêt retient que la révocation du gérant de la société Edivia a laissé la gérance vacante et ordonne la désignation d'un administrateur avec pour mission de convoquer et présider l'assemblée générale des associés ; que c'est par une décision motivée, sans s'immiscer dans la gestion de la société et en respectant les pouvoirs et la liberté des associés, qui demeuraient libres de leur vote, ni encourir les griefs de la seconde branche, que la cour d'appel a précisé que l'assemblée générale aurait pour ordre du jour la constatation de la révocation et la nomination de Mme X... en remplacement ; que le moyen n'est pas fondé ; »

 

Le demandeur se pourvoi donc en cassation au motif que la cour d’appel aurait outrepassé ses pouvoirs en fixant lui même l’ordre du jour, et avoir indiqué directement l’associé majoritaire comme proposition de remplacement. 

La Cour de cassation rejette donc le pourvoi formé par le demandeur en confirmant que la Cour d’appel n’avait pas outrepassé ses pouvoirs puisque le vote des associés étaient restés libre, et que la décision de fixer l’ordre du jour avait été suffisamment motivé. 

 

 

Cet arrêt suit en réalité une logique déjà utilisé par le passé, et qui repose sur la distinction entre « carence » et « vacance » du poste de gérant (I) concernant la désignation d’un mandataire ad hoc à la suite de la révocation judiciaire du gérant. La seconde logique expliquant cet arrêt repose sur la liberté laissé aux associés (II). 

 

 

        

         I/ La vacance du poste de gérant palier par l’article 812 du Code de procédure civil

 

 

La distinction peut paraitre ici minime, car certes la vacance du poste de gérant entraine nécessairement la carence de ce même poste. Cependant, cette différence à de lourde conséquence juridique. 

 

En effet, la SARL est en principe régit par l’article L223-27 al.7 du code de commerce disposant que « tout associé peut demander en justice la désignation d’un mandataire chargé de convoquer l’assemblée et de fixer son ordre du jour » , ici le juge statue en principe en référé. 

Cependant la Cour de cassation a précisé dans un arrêt daté du 19 décembre 2006 que lorsqu’il n’y a pas uniquement carence mais vacance de la gérance alors le juge pouvait agir hors le cadre de cet article, et utilisé ses prérogatives détenu en vertu de l’article 812 du code de procédure civil disposant que « il peut également ordonner sur requête toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu’elles ne soient pas prises contradictoirement ». 

 

La révocation judiciaire du gérant ayant eu pour conséquence immédiate de priver la société de représentant légal, la chambre commerciale a estimé que les circonstances exigeaient bien que les mesures prises (la fixation de l’ordre du jour et la désignation d’un mandataire ad hoc) étaient urgentes pour risquer qu’elles ne soient prises contradictoirement. 

 

La non immixtion du juge dans la gestion de la société concernant la la fixation de l’ordre du jour souffre d’une seconde condition qui est la motivation de la décision. En effet la Chambre commerciale rappelle que la décision a été motivé et de ce fait la Cour d’appel n’avait pas outrepassé ses pouvoirs.

 

 

 

         II/ Le respect des pouvoirs et la liberté des associés 

 

 

L’une des revendications du demandeur au pourvoi était le fait que les juges du fond ne s’étaient pas borné à mettre a l’ordre du jour de l’assemblée générale la constatation de la révocation de l’ancien gérant et la nomination d’un nouveau dirigeant, mais y avaient inscrit un le nom de l’associé majoritaire en remplacement. 

Chose qui peut paraître plus que douteux car manquant de neutralité. 

 

Mais la encore la Chambre commerciale répond négativement, ré-expliquant que la décision a été motivé mais plus encore que les juges ne s’étaient pas immiscer dans la gestion de la société car ils avaient respecté les pouvoirs et la liberté des associés, car les votes leur appartenaient toujours. 

 

A l’inverse justement un arrêt du 16 décembre 2009 rendu par la 3ème chambre civile avait casser un arrêt car le mandataire en question devait voter en lieu et place d’un associé a la suite d’un abus de minorité; de ce fait le sens du vote avait été fixé puisque le mandataire aurait suivi la proposition de remplacement du juge qui l’a lui même nommé. 

 

Joan DRAY

Avocat à la Cour

26 septembre 2017

Décryptage de la réforme du Code du Travail avec Romain GERARDIN-FRESSE, juriste spécialisé en droit social

 

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Le 22 Septembre dernier, Emmanuel MACRON signait les cinq ordonnances réformant le Code du travail.

Elle ont été publiées, le samedi 23 Septembre au matin, au Journal officiel pour une entrée en vigueur immédiate.

 Une partie des mesures s'appliquent dès publication, tandis que d'autres nécessiteront des décrets d'application, qui seront publiés d'ici au 31 décembre.

 Une réforme présentée comme majeure par le gouvernement, et concédée comme telle tant par la majorité que par l’opposition, respectivement fervente partisane et détractrice déterminée.

 

Décrpyptage de ce tournant économique et social avec Romain GERARDIN-FRESSE, juriste spécialiste du droit social.

 

 

 

Cette fin Septembre 2017 restera le marqueur fort de la politique macroniste en matière sociale, avec l’adoption, après la loi d’habilitation, des cinq réformes majeures voulues par le Président de la République, et mesures phares de son quinquénnat.

 

Tellement emblématique de son programme présidentiel, que le décret d’application a été signé en direct à la Télévision par Emmanuel MACRON et en présence de la Ministre du Travail Murielle PENICAUD et du Secrétaire d'État chargé des Relations avec le Parlement et porte-parole du gouvernement Christophe CASTANER, comme pour impacter durablement les esprits.

 

« Il s’agit en effet d’un tournant en matière de droit social » indique Romain GERARDIN-FRESSE.

« Le système français est profondément complexe, avec une part de hasard importante qui peut tarauder voir dissuader un chef d’entreprise lors de la prise de décision d’embaucher sur le long terme » poursuit-il.

« Avec le plafonnement des indemnités prud’hommales, par un barème indexé sur l’ancienneté au sein de l’entreprise, cela va dans le sens de la logique et évite une dérégulation du coût du travail en cas de cessassion des relations professionnelles entre l’employeur et le salarié . De surcroît, l’instauration d’un plancher indemnitaire permet d’inscrire des bases définies quant à un éventuel dédommagement dans des cas précis, et instaure de fait une assurance pour le salarié en cas de départ imprévu. »

 

Néanmoins le juriste tempère en ajoutant que « Cela ne règlera pas pour autant l’intégralité des problèmes rencontrés par les employeurs lorsqu’ils sont confrontés au Conseil de Prud’Hommes en cas de licenciement.

Même si les Juges et les conseillers prud’homaux exercent leurs fonctions avec rigueur et probité, ayant une véritable foi en leur rôle, il sont souvent confrontés à des dossiers d’une telle complexité, que de simples barèmes ne pourront pas régler intégralement les problématiques . D’ailleurs, Le plafonnement envisagé ne concerne pas l'ensemble des demandes dont un Conseil de Prud'hommes peut être saisi ; au titre de la réparation du préjudice, les dommages et intérêts pour licenciement vexatoire, les dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité de résultat, les dommages et intérêts pour harcèlement, etc ne sont pas soumis à ce barême.

Ces indemnités de licenciement prud'homales sont actuellement régies par une vieille loi de 1974 qui prévoit une indemnité minimum de 6 mois de salaire pour les salariés injustement licenciés qui justifient de plus de 2 ans d'ancienneté et travaillent dans une entreprise de plus de 10 salariés. Sous cette réserve, le principe est celui de l'octroi d'une indemnité réparant le préjudice prouvé, souverainement appréciée par les Conseils de Prud'hommes sans aucun plafond. »

 

Et contrairement à ce qu’il aurait été permis de croire, les conseils de Prud’Hommes ne sont plus si généreux qu’ils ne le furent.

Aussi, cette solution imposée qu’est le barême inidcatif, serait un principe de concensus universel qui trouverait grâce aux yeux des employeurs comme à ceux des salariés.

 

« Ce fondement de barême jouera en définitive le rôle d’un forfait indemnitaire, qui apportera de la clareté et de la visibilité, tant pour l’employeur que l’employé.

Il s’agira en réalité d’une clause tacite supplétive inhérente à un contrat de travail à durée indéterminée s’imposant aux deux parties le ratifiant, prévoyant le montant versé en cas de rupture impropre, compte tenu de l’évolution de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise. »

 

Néanmoins, Romain GERARDIN-FRESSE réfute l’argument visant à dire que cette réforme sera un « permis de licencier », comme certaines formations politiques et syndicales l’ont présenté.

 

« Les modalités de ventilation telles qu’elles existent dans le cadre d’un jugement prud’homal pourront en réalité laisser la possibilité aux juges et conseiller prud’homaux d’allouer la somme qu’ils estimeront juste aux requérants, simplement l’intitulé de l’indemnité changera » expose le juriste.

« En cas de licenciement injustifié,  il suffira au conseil de céans de reporter la somme la plus importante au titre d’une indemnité pour licenciement vexatoire, elle, non plafonnée. »

 

En résumé, il s’agit là d’une mesure qui n’aura pas grand impact sur la gestion des litiges salariaux, mais qui dans la forme rassure le patronat.

 

« Celle qui va réellement intéresser les dirigeant des PME, est la mesure visant à la négociation dans l’entreprise » complète Romain GERARDIN-FRESSE.

 

 

Si jusque lors, les entreprises devaient passer par un salarié mandaté par une organisation syndicale, le gouvernement ambitionne de simplifier la négociation dans les petites entreprises dépourvues de délégué syndical.

Jusqu'à 20 salariés, elles pourront négocier avec de simples employés non mandatés par un syndicat et, entre 20 et 50 salariés, elles pourront négocier avec un élu du personnel également non mandaté.

 

Mais pour que cette prérogative puisse entrer en vigueur, il faut encore qu’elle passe la barrière bicamériste, avec une première lecture à l’Assemblée Nationale, puis un avis du Sénat.

 

 

Aude COMPAS

 

26 septembre 2017

Présomption du préjudice en cas de perte injustifiée de l’emploi du salarié

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Le salarié injustement privé de son emploi doit saisir le juge du travail afin de demander une indemnisation au titre du préjudice subi.

Le juge peut-il apprécier l’indemnisation du salarié relative à la perte injustifiée de son emploi ?

Dans un arrêt rendu le 13 septembre 2017 (n° 16-13.578), la chambre sociale de la Cour de cassation a indiqué que la perte injustifiée de son emploi par le salarié lui cause un préjudice dont il appartient au juge d’apprécier l’étendue.

La solution est rendue au visa de l’article L. 1235-5 du code du travail selon lequel le salarié peut prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi.

Cette décision vient censurer la décision d’appel qui avait considéré que le salarié doit justifier du préjudice subi du fait du licenciement pour prétendre à une indemnité.

A contrario, la Cour de cassation tient comme position le fait que le salarié n’a pas à justifier du préjudice subi consécutivement à son licenciement abusif pour bénéficier d’une indemnisation, ce qui revient à dire que le salarié bénéficie d’une présomption du préjudice subi du fait de la perte injustifiée de son emploi.

Cette solution vient largement contrebalancer la série de décisions de la chambre sociale suivant lesquelles le salarié doit démontrer avoir subi un préjudice résultant des manquements de l’employeurs à des obligations purement formelles :

- remise tardive du certificat de travail et des bulletins de paie (Cass. Soc., 13 avril 2016, n° 14-28.293) ;

-  inobservation de la procédure de licenciement (Cass. Soc., 30 juin 2016, n° 01-41.364) ;

- défaut d’information sur le bulletin de paie de la convention collective applicable (Cass. Soc., 17 mai 2016, n° 14-21.872) ;

- nullité de la clause de non-concurrence (Cass. Soc., 25 mai 2016, n° 14-20.578) ;

- organisation tardive de la visite médicale de reprise (Cass. Soc., 17 mai 2016, n° 14-23.138).

L’évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation est marquée par l’équilibre de la relation entre l’employeur et le salarié : d’un côté, elle permet d’assouplir le risque indemnitaire pour l’employeur qui commet des irrégularités formelles, par son insuffisance ou sa négligence, de l’autre, elle renforce considérablement la logique indemnitaire au profit du salarié lorsqu’il subit de son employeur une irrégularité de fond tenant à l’abus et, dans certains cas, à l’intention de nuire.

Cela étant, cette évolution jurisprudentielle dont il est remarquable qu’elle veut rééquilibrer judiciairement les relations contractuelles entre les parties au contrat de travail vient se heurter à l’entrée en vigueur récente de la réforme du code du travail qui consiste, entre autres, à encadrer quantitativement l’indemnisation relative à la rupture injustifiée du contrat de travail du salarié, comme une manière de systématiser la réparation d’un préjudice qui, surtout et plus qu’ailleurs en droit du travail, par lequel le salarié engage sa propre personne dans la relation contractuelle, n’est absolument pas quantifiable ni déterminable d’une situation à l’autre.

C’est qu’en effet, comment peut-on raisonnablement et humainement mettre sur un même barème d’indemnisation le jeune cadre diplômé de 25 ans et la mère célibataire non qualifiée de 50 ans avec trois enfants à charge avec pour seul point commun le fait d’avoir subi un licenciement abusif, sans entraver de manière significative la fonction du juge dans l’appréciation du préjudice et les conséquences à en tirer ?

Ce travail d’appréciation du préjudice subi ne revient ni au pouvoir législatif, ni au pouvoir exécutif mais bien au pouvoir judiciaire en ce qu’il est indépendant et autonome de toute influence qui voudrait voir de lui qu’une simple machine à rendre des décisions, à les systématiser, sans autre forme d’humanité et de raison, pourtant propre au Code Napoléon instaurant au droit de la responsabilité civile une logique d’indemnisation.

Et c’est d’ailleurs bien la raison pour laquelle la Cour de cassation précise dans sa décision qu’il appartient au juge (et seulement au juge) d’apprécier l’étendue du préjudice résultant de la perte injustifiée de son emploi par le salarié.

Jérémy DUCLOS

Avocat à la Cour

 

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15 septembre 2017

La gestion et le financement mutualisés des prestations d’action sociale et de prévention : déchiffrage du décret du 9/02/2017

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Selon l’article L. 911-1 du Code de la sécurité sociale, l’employeur peut instituer des garanties collectives à l’égard de ses salariés en complément de celles qui résultent de la sécurité sociale. Les accords professionnels, négociés par les partenaires sociaux au niveau d’une branche professionnelle, ou les accords interprofessionnels qui réunissent plusieurs branches professionnelles, peuvent néanmoins imposer des garanties obligatoires pour leur champ d’application.

A ce titre, l’article L. 912-1 du Code de la sécurité sociale précise que ces accords professionnels ou interprofessionnels sont dits « à haut degré de solidarité » lorsqu’ils instituent des « prestations à caractère non directement contributif », c’est à dire, d’après le quatrième point de ce même article, des « prestations nécessitant la prise en compte d’éléments relatifs à la situation des salariés ou sans lien direct avec le contrat de travail les liant à leur employeur ». En d’autres termes, il s’agit des prestations dont l’attribution n’est pas strictement proportionnelle aux cotisations versées par le salarié et reposant sur un mécanisme de solidarité.

Pour exemple, ces prestations peuvent prendre la forme « d’une prise en charge partielle ou totale de la cotisation pour certains salariés ou anciens salariés, d’une politique de prévention ou de prestations d’action sociale ».

Le quatrième point de cet article prévoit également que certaines de ces prestations « nécessitant la prise en compte d’éléments relatifs à la situation des salariés ou sans lien direct avec le contrat de travail les liant à leur employeur » peuvent faire l’objet d’un financement et d’une gestion mutualisée pour toutes les entreprises entrant dans le champ d’application de l’accord professionnel ou interprofessionnel à haut degré de solidarité, « selon des modalités fixées par décret ».

Il aura fallut attendre un décret du 9 février 2017 pour voir  les modalités de gestion mutualisée de ces prestations précisées, pour les accords conclus ou en cours de renouvellement. Ce dernier insère un nouvel article R. 912-3 au Code de la sécurité sociale rédigé en ces termes :

« Lorsqu’ils mettent en œuvre une gestion et un financement mutualisés des prestations nécessitant la prise en compte d’éléments relatifs à la situation des salariés ou sans lien direct avec le contrat de travail les liant à leur employeur, les accords professionnels et interprofessionnels à haut degré de solidarité 

1° Définissent les prestations gérées de manière mutualisée qui comprennent des actions de prévention ou des prestations d’action sociale mentionnées à l’article R. 912-2 ; 

2° Déterminent les modalités de financement de ces actions. Ce financement peut prendre la forme d’un montant forfaitaire par salarié, d’un pourcentage de la prime ou de la cotisation mentionnée à l’article R. 912-1, ou d’une combinaison de ces deux éléments ; 

3° Créent un fonds finançant les prestations mentionnées au 1° et percevant les ressources mentionnées au 2° ; 

4° Précisent les modalités de fonctionnement de ce fonds, notamment les conditions de choix du gestionnaire chargé de son pilotage par la commission paritaire de branche. »

Le nouvel article apporte donc des précisions sur les prestations pouvant faire l’objet d’un financement et d’une gestion mutualisés au niveau professionnel ou interprofessionnel (I), mais n’encadre pas entièrement les conditions de fonctionnement du fonds unique de solidarité (II).

I – Les prestations faisant l’objet d’une gestion et d’un financement mutualisés 

La loi prévoyait une possibilité de gestion mutualisée de « certaines prestations nécessitant la prise en compte d’éléments relatifs à la situation des salariés ou sans lien direct avec le contrat de travail les liant à leur employeur ». Mais une interprétation stricto sensu du décret réduit le champ d’application aux seules «  actions de prévention ou des prestations d’action sociale mentionnées à l’article R. 912-2 ». Pour autant, de telles actions peuvent couvrir un champ assez large.

  • Les prestations citées à l’article R. 912-2 du code de la sécurité sociale : l’action sociale et les actions de prévention

L’article R. 912-2 du code de la sécurité sociale définit les mesures de prévention et les mesures d’action sociale.

Les premières regroupent les actions de prévention contre les risques professionnels ou contre d’autres objectifs de la politique de santé nationale ou professionnelle, notamment les comportements en matière de consommation médicale, les conditions de vie au travail et la santé des salariés.

Les secondes, dans un cadre collectif, renvoient, notamment, à « l’attribution suivant des critères définis par l’accord d’aides pour les salariés, les anciens salariés ou leurs ayants droit leur permettant de faire face à la perte d’autonomie, y compris au titre des dépenses résultant de l’hébergement d’un adulte handicapé dans un établissement médico-social, aux dépenses liées à la prise en charge d’un enfant handicapé ou à celles qui sont nécessaires au soutien apporté à des aidants familiaux ».

A  noter que les contributions patronales visant à financer des prestations d’action sociale bénéficient d’un régime social avantageux puisqu’elles ne sont pas soumises à cotisations de sécurité sociale  ni même à la CSG et à la CRDS ou à la taxe de prévoyance.

  • Une liste non exhaustive

Il faut préciser que ces prestations de solidarité ne constituent pas nécessairement « des compléments de prestations versées par le régime de base de la sécurité sociale » au sens strict du terme, puisque le régime de base ne prévoit pas forcément de prestations similaires. Il faut donc adopter une vision large de la notion de « prestation complémentaire », englobant toutes prestations visant à protéger un individu d’un risque pour lequel le régime de base n’est pas, ou que partiellement, intervenu.

En pratique, les actions de prévention et d’action sociales sont déterminées par la commission paritaire de branche, instance de négociation entre les partenaires sociaux d’une branche professionnelle, qui en contrôle également la mise en œuvre.

Généralement, les partenaires sociaux ont l’habitude de se cantonner à la lettre de R. 912-2 en renvoyant l’attribution de prestations de solidarité à une analyse casuistique de la situation personnelle du salarié.

Néanmoins certaine branche tiennent aussi compte des  problèmes spécifiques de leur secteur : sevrage alcoolique dans la branche des « vins, cidres et jus de fruits », aide aux veuves d’agriculteurs dans la branche « Agriculture », etc.

Le décret apporte donc les précisions attendues sur les prestations qui peuvent faire l’objet d’une gestion et d’un financement mutualisés, mais l’organisation du dispositif autour d’un fonds unique de solidarité reste complexe.

II – Le financement et le fonctionnement du fonds unique de solidarité 

Jusqu’alors, les accords de branches pouvaient soit laisser le libre choix aux employeurs de l’organisme assureur auquel verser la cotisation destinée au financement de la solidarité de branche (2% minimum des cotisations du régime complémentaire mis en place), soit imposer un fonds de solidarité unique, celui l’organisme assureur recommandé pour la gestion du régime complémentaire.

Dans ce deuxième cas,  les entreprises ayant opté pour un autre organisme assureur que l’organisme recommandé par la branche devaient demander qu’un transfert de fonds soit effectué pour cette fraction de cotisations.

Ce sont ces transferts de fonds qui posaient des problèmes techniques aux organismes assureurs. Certains préféraient utiliser leur propre fonds et garantir aux employeurs adhérents les prestations de solidarité prévues par leur branche.

Le décret a donc tenté de clarifier la situation en précisant les modalités de fonctionnement et de financement du fonds unique de solidarité.

  • Les modalités de fonctionnement du fonds

Le décret prévoit désormais que le fonds unique de solidarité est « créé » par les accords de branche ou les accords interprofessionnels qui doivent également définir « les conditions de choix du gestionnaire chargé de son pilotage par la commission paritaire de branche ».

Puisqu’aucun mécanisme de mise en concurrence n’est imposé, les familles d’assureurs (mutuelles, sociétés d’assurance, institution de prévoyance) craignent qu’en pratique la gestion du fonds continue d’être automatiquement attribuée à l’organisme recommandé par la branche pour la gestion du régime complémentaire.

Les commentateurs envisagent quant à eux la multiplication de gestionnaires « ad hoc » créés par les partenaires sociaux des branches professionnelles eux-mêmes, tel que l’avaient déjà tenté les branches du recyclage et des vins et spiritueux avant l’adoption du décret en mettant en place des associations de gestion sociale.

  • Les ressources du fonds

L’article R.912-3 issu du décret établi clairement le mode de financement des prestations de prévention et d’action sociale lorsque ces dernières sont mutualisées. Il reprend des pratiques déjà établies par les conventions de branche.

Ainsi, les ressources du fonds unique de solidarité sont tirées :

  • soit d’un montant forfaitaire par salarié (par exemple la branche automobile prévoit une cotisation de 2€ par salarié répartie entre salarié et employeur),
  • soit d’un pourcentage de la prime ou de la cotisation de 2% acquittée par l’employeur pour toutes les prestations de solidarité,
  • soit une combinaison de ces deux éléments.

Désormais, les accords de branche devront donc obligatoirement prévoir un fonds de solidarité commun à toutes les entreprises de leur champ d’application abondé directement par les employeurs, mettant ainsi fin aux transferts de fonds entre assureurs.

 

Manon Blanleuil
Master 2 DPSE, Promotion 2016/2017, Université Paris I – Panthéon Sorbonne,
Apprentie juriste à la MGP.

Astrid Bourdieu
Master 2 DPSE, Promotion 2016/2017, Université Paris I – Panthéon Sorbonne,
Apprentie juriste à la SNCF

26 octobre 2016

Protection des données personnelles : conciliation avec d’autres droits fondamentaux

Le présent article a pour objectif d’illustrer la conciliation entre le droit à la protection des données personnelles et d’autres droits fondamentaux. L’analyse est centrée sur les dispositions de la Directive 95/46/CE, la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne et de la Cour Européenne des Droits de l’Homme ainsi que les nouveautés introduites par le Règlement (UE) 2016/679.

Consacré à l’article 8 de la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne, le droit à la protection de données personnelles n’a cessé de croître en importance. La conciliation entre celui-ci et l’exercice d’autres droits fondamentaux pose d’innumérables questions d’ordre technico-juridique dont une partie considérable est examinée dans cette contribution.
Durant les dernières années, nous avons assisté à l’éclosion d’un droit fondamental dont les contours se caractérisent par leur imprécision : la protection de données personnelles.


Parallèlement à son développement normatif, le droit fondamental à la protection de données personnelles a dû faire face à certains défis marqués par un haut degré de complexité. Parmi les questions qui ont été soulevées, la conciliation avec d’autres droits fondamentaux occupe une place de premier plan, constituant, dans cette mesure, l’objet de cet article.
Afin d’offrir une vision claire et systématique de la problématique, nous avons divisé l’exposé en trois grandes parties : une première, relative au parcours historique du droit fondamental à la protection des données et à la présentation du sujet abordé dans notre étude ; une deuxième, consacrée à l’analyse, du point de vue jurisprudentiel, de la conciliation entre la protection des données et trois autres droits fondamentaux (liberté d’expression, droit de propriété et liberté d’entreprise) ; enfin, une troisième partie regroupant, sous forme de conclusion, les aspects les plus significatifs de notre travail.
Comme le lecteur aura l’occasion de l’observer, la deuxième partie constitue le noyau dur de l’étude. Celle-ci se structure en trois sous-parties, chacune s’occupant de la conciliation entre le droit à la protection des données et l’un des trois droits fondamentaux mentionnés supra. Chaque sous-partie s’inaugure avec un bref exposé sur le droit concerné et les points de friction entre le premier et la protection de données personnelles, suivi d’une analyse critique à l’égard de la conciliation des deux droits fondamentaux effectuée par la Cour de Justice de l’Union Européenne et de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
Finalement, et avec l’intention de fournir une étude complète de la problématique, nous avons inclus diverses références au nouveau Règlement européen relatif à la protection de données personnelles et aux innovations que celui-ci introduit dans la matière.

Nelson Rodrigues

 

4 février 2016

CE, 30 déc. 2015, Obligation pour un responsable de traitement de s’assurer de la sécurité des données personnelles

CE, 30 déc. 2015, Obligation pour un responsable de traitement de s’assurer de la sécurité des données personnelles gérées par un sous-traitant

 

Dans cette décision du 30 décembre 2015, le Conseil d'État confirme une délibération de la CNIL ayant prononcé un avertissement public contre la société Orange confirmant ainsi l'obligation du responsable de traitement de données à caractères personnelles de prendre des mesures positives afin de s'assurer que les données confiées à un sous-traitant soient sécurisées.

Conseil d’Etat, 30 décembre 2015, n° 385019

Une intrusion illicite sur le serveur d’une société sous-traitante d’un prestataire d’Orange a permis d’accéder aux données personnelles de plus d’un million de clients et prospects de l’opérateur.

Conformément à l’obligation qui lui est faite par l’article 34 bis de la loi « Informatique et Libertés », Orange a notifié l’incident à la CNIL, qui a alors décidé d’opérer une mission de contrôle à l’issue de laquelle un avertissement public a été prononcé à son encontre, pour manquement à l’obligation de prendre toutes les précautions utiles pour préserver la sécurité des données.

Attaquée sur plusieurs points procéduraux (en relation notamment au droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination), tous rejetés, la décision retiendra surtout l’attention concernant les mesures à prendre pour assurer la sécurité des données sous-traitées.

Le Conseil d’État souligne dans un premier temps que « la seule mention, dans le contrat liant la société Orange à son prestataire […] d’une obligation de sécurité mise à la charge de [ce dernier] et de ses sous-traitants ne dispensait pas la société Orange de prendre des mesures destinées à s’assurer elle-même que la sécurité de ses données était préservée ».

Or, l’opérateur n’a pas pris les mesures lui permettant de s’assurer lui-même de cette sécurité :

  • En n’ayant pas fait procéder à un audit de sécurité sur l’application qui avait été spécialement définie pour la prospection commerciale de ses clients ;
  • En n’ayant pas utilisé des moyens de communication sécurisés pour transférer à ses prestataires des données à caractère personnel ;
  • En n’ayant pas veillé à ce que les consignes de sécurité prévues contractuellement avec son prestataire soient portées à la connaissance du prestataire secondaire.

 

Ainsi, en raison du caractère personnel des données qui ont fait l’objet d’un accès illicite et du nombre important des personnes concernées, le Conseil d’État a estimé que la CNIL avait pu à bon droit estimer que la société Orange avait méconnu les obligations de sécurité mises à sa charge.

Orange avançait enfin que la sanction était disproportionnée, l’atteinte n’ayant pas concerné des données sensibles. Malgré cet argument, le Conseil d’État a validé l’approche pragmatique de la CNIL qui avait choisi une telle sanction eu égard à la nature des violations, mais également aux moyens humains et financiers dont disposait Orange pour les prévenir.

En définitive, cet arrêt rappelle que la responsabilité d’un traitement n’est pas transférée en même temps que la transmission du contrôle technique dudit traitement et que le responsable de traitement ne peut pas se retrancher derrière le contrat organisant la sous-traitance pour échapper à ses propres obligations.

Reste à savoir ce qu’il adviendra une fois le règlement européen sur la protection des données personnelles adopté.

En effet, alors que la proposition de règlement (disponible en sa dernière version sur le site du Parlement européen) prévoyait que « le responsable du traitement et le sous-traitant sont libres de définir leurs rôles et tâches respectifs quant au respect des exigences [dudit règlement] », cette possibilité semble avoir disparu du compromis atteint en décembre dernier par les autorités européennes (mis à disposition par Numerama).

On peut donc en conclure que le responsable de traitement, une fois le texte définitif adopté, restera le premier coupable en cas de violation de l’obligation de sécurité, même si la lecture du compromis laisse entrevoir que le sous-traitant sera bien plus impliqué qu’il ne l’est aujourd’hui, notamment en ce qu’un plus grand nombre d’obligations seront directement à sa charge.

 

Anita Delaage – Avocat

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